dimanche 28 août 2022

Semaine dans les Dolomites, suite...

Après la face nord de la Civetta, nous comptions rester sur les pas de monsieur Solleder en allant faire sa voie au Sass Maor mais renseignement pris auprès du gardien du refuge de Velo della Madonna, il y déjà pas mal de cordées avec le même projet pour le lendemain, notamment des groupes du stage de guides Ensa également en déplacement dans les Dolomites. On change donc d'idée au dernier moment et nous orientons vers la logique combinaison des voies Castiglioni-Detassis à la Pala del Rifugio et Weissner-Kees au Sass d'Ortiga, située l'une au-dessus de l'autre et proposant mine de rien plus de 900 mètres d'escalade. 

Partis tôt du parking, les difficultés modérées et un rocher alvéolé d'excellente qualité nous permettent d'avancer d'un bon pas dans la première voie sur la Pala del Rifugio, en progressant souvent simultanément parmi les merveilleux paysages du Val Canali.


 

Dessin en deux secondes de Kaoli dans le cahier sommital de la Pala del Rifugio
 
D'ici, le magnifique pilier du Sass d'Ortiga se dresse à portée de main, une invitation à la grimpe...


Bien que raide et orgueilleux, ce pilier se gravit sans dépasser le V, à part un court passage en 6a quelques mètres sous le sommet. C'est certainement une des plus belles escalades des Dolomites dans ce niveau de difficulté, au rocher irréprochable et tellement ludique. Nous y retrouvons une cordée d'italiens arrivés directement du refuge ainsi que Mathias Dunand des Contamines-Montjoie avec des copains guides et aspis en vacances grimpantes dans le coin. Une fin de voie et retour en vallée en bande ainsi bien sympas.


Pour le dernier jour avant de faire la route de retour, il nous faut un peu de courage pour remettre le réveil à 4h puis remonter les 800 m de sentier bien raide menant au joli bivouac Carnielli au pied du Spigolo Nord-Ouest (voie Gianeselli) du Spiz di Mezzo dans le val Pramper au-dessus de Forno di Zoldo. C'est une voie que je voulais faire depuis longtemps pour son tracé élégant et surtout parce qu'elle se situe dans un coin tranquille. Nous ne l'avons pas regretté. L'escalade sur ce pilier raide est très astucieuse et bien typique des Dolomites. Une belle façon de terminer ce court voyage et surtout de garder l'eau à la bouche pour d'autres aventures sud-tyrolienne que j'espère très prochaines...



Monsieur Solleder en 1925

Parmi les grandes parois et faces nord historiques, il en est une qui ne laisse pas insensible la première fois qu'on l'aperçoit, c'est celle de la Civetta, la Paroi des Parois comme la surnomment les grimpeurs germanophones, "Die Wand Aller Wânde". Ce qui tombe bien, c'est qu'elle se situe dans les Dolomites, un massif que j'adore et que j'essaye de fréquenter au moins une fois par an malgré son éloignement depuis le village reclus de Sévignacq-Meyrac en vallée d'Ossau. Entre les tours et parois de sable de Wadi Rum et celles calcaires du Sud-Tyrol, mon cœur balance mais la fascination est à chaque fois renouvelée et je retrouve dans ces deux coins du globe les mêmes sensations et envies de grimper dès que je lève la tête.

Un rallye automobile de 1500 km (en BMW s'il vous plait pour la première partie jusqu'à Chamonix, conduite "le coude à la portière en insultant les passants" comme disait l'ami Bunny, car le hasard a fait que Yves le copain garagiste grimpeur peu inquiet m'a prêté la veille de partir et pour un mois cet étonnant véhicule gris métallisé coupé sport, le temps qu'il répare mon Peugeot Partner vieux de 400 000 km qui a lamentablement échoué à son dernier contrôle technique et que ça va me faire tout drôle de retrouver après une telle débauche de luxe) nous dépose à Agordo, la résidence d'été du guide et ami Philippe Brass auprès duquel on passe glaner quelques derniers renseignements. Bien nous en prend car il nous refile un très bon topo et se propose gentiment de nous monter au-dessus du refuge Vazzoler, ce qui réduit à 45 minutes l'approche de fin d'après-midi au refuge Tissi où ne nous attendent que de belles surprises : nous serons seuls demain dans cette face nord haute de 1100 m et large de 3 km, les gardiens vraiment accueillants nous prêtent une frontale car Kaoli a laissé la sienne en vallée et nous passons la soirée à discuter avec un couple de randonneurs australiens très sympas.

J'ai failli partir dans cette voie Solleder un peu la fleur au fusil, en tennis d'approche comme souvent dans ce type de difficulté, mais en appelant un ou deux copains juste avant de monter au refuge, leurs sons de cloches ont été unanimes : à la Civetta, ça grimpe, les cotations sont serrées et dans cette voie, il est facile de s'égarer. Finalement, je n'ai pas regretté d'avoir pris les chaussons pour quelques longueurs car je confirme ce que les potes m'ont dit. Les V+ ne risquent pas d'être décotés, en particulier le premier pas de la voie, en conglomérat (!), coté même V dans certains topos. Au niveau du Cristallo, le névé central qui reste toute l'année, deux longueurs sont en rocher orange bizarre demandant pas mal d'attention. La seconde partie est plus facile et roulante mais il reste du chemin. Contrairement à d'autres voies classiques et fréquentées des Dolomites, ici ce n'est pas truffé de pitons dès que ça se durcit et une autre particularité de la Solleder-Lettenbauer est qu'il faut rester bien concentré toute la journée sur le topo pour ne pas s'égarer.

Nous sommes arrivés au sommet en 11 heures d'escalade bien remplies, vraiment impressionnés par l'audace et la solidité des ouvreurs qui en 1925 n'ont mis que 15 heures et utilisé 12 pitons lors de la première. Encore une voie qui témoigne des décennies d'avance qu'avaient les grimpeurs des Dolomites sur leurs homologues des Alpes Occidentales. Nous avons eu le temps de descendre le soir même à Agordo sans rallumer la frontale, en passant par la ferrata Tissi puis les fabuleux plateaux et vallons qui contournent la Torre Trieste pour ramener en vallée. Après la Walker aux Jorasses en juillet, on va finir par surnommer Kaoli "madame faces nord"... Encore bravo et merci !

On peut trouver un diaporama de cette voie sur mon site en cliquant ici







mardi 16 août 2022

ROC

Voici un magnifique livre que je recommande vivement, écrit par les copains Jérome Blanc Gras et Manu Ibarra après des années de travail. C'est aux Éditions du Mont Blanc (Catherine Destivelle). La partie historique est particulièrement fournie et intéressante car on y trouve beaucoup de choses peu connues et plus originales que l'histoire officielle. Accessoirement, je me fais un peu de pub car j'ai donné nombreuses de mes photos pour cet ouvrage.



lundi 15 août 2022

Pène Sarrière noir et blanc

Une petite sélection d'images de l'arête sud du Pène Sarrière, souvent gravie dernièrement lors de stages d'autonomie en l'alpinisme



 



Éperon Est à l'Ossau

 Une petite photo de Renaud à l'éperon est de le Pointe Jean Santé vendredi dernier



samedi 13 août 2022

Pointe Chaussenque

Chaque été, nous prévoyons deux courses avec Pierre et il faut croire que la chance nous porte car il fait toujours grand beau quand il rapplique. Cette année au programme, la voie Immortèla pour se remettre dans le bain et ré-apprivoiser la marche dans les blocs pendant l'approche.

Puis, l'idée principale de la semaine, l'Éperon Nord-Ouest de la Pointe Chaussenque au Vignemale. Ouverte en un peu plus de 3 heures (!) en 1945 par F. Boyrie et J. Simpson, j'étais très content que Pierre souhaite faire cette voie, que je lui avais montré du coin de l'oeil en faisant la face nord juste en face il y a quelques années. En effet, je n'en avais qu'un souvenir diffus car je l'avais seulement gravie une fois seul à l'âge de 19 ans, en faisant dans la même journée cette dernière et la face nord classique de la Pique Longue.

C'est un beau voyage, on serre un peu les fesses au départ en remontant les rives du couloir de Gaube rapport au risque de chutes de pierres puis 2 ou 3 longueurs astucieuses permettent de rejoindre du terrain plus couché, avant de louvoyer au mieux derrière le fil de l'éperon en versant ouest. Le rocher est correct mais demande plus d'attention que dans le face nord classique de la Pique Longue. Les vues sur les parois environnantes sont fantastiques ! Merci Pierre de continuer me faire confiance, je rigole bien avec toi et ton optimisme sans faille de vieux de la vieille de la montagne loin d'être vieux.

On peut trouver un album photo de cette voie sur mon site en cliquant ici ainsi qu'un topo qu'un topo perso en cliquant ici


 

vendredi 12 août 2022

En face nord du Vignemale

Retour en face nord du Vignemale le mercredi 3 juillet, cette fois avec Thomas, qui grimpe en courant, entre deux considérations géopolitiques, un sujet sur lequel il est particulièrement calé et dont j'adore discuter avec lui, bien que ça fasse plus peur en ce moment que les séracs, les avalanches et les chutes de pierres. "Partis tôt, rentrés tôt", comme dirait mes confrères alpins, de quoi faire une grosse sieste au refuge l'après midi en attendant Pierre pour aller à la Pointe de Chaussenque le lendemain. Merci Thomas, c'est toujours un plaisir !






jeudi 11 août 2022

Au Néouvielle avec Pierre

En rentrant de vacances bien occupées dans les Alpes (gérer un piratage d'ordi et de comptes mail entre et pendant deux grandes courses, ça repose pas l'esprit !), Pierre m'attendait de pied ferme lundi 1er août pour les deux ascensions que nous faisons chaque année lors de sa petite semaine en célibataire dans les Pyrénées. Cette fois, pour s'entraîner en vue de l'Éperon Nord-Ouest de la Pointe de Chaussenque, ce sera la voie Immortèla dans la face sud du Néouvielle. En ces temps de canicule, nous n'y avons pas eu froid et nous avons aussi amélioré nos techniques de progression dans les chaos de blocs avec l'absence de névés sur la voie normale...


 
 


mardi 9 août 2022

Dibona, Stofer, Cassin, Chapoutot et les autres…

Les itinéraires d’escalade et d’alpinisme s’ouvrent avec leur temps, au bénéfice des modes et styles du moment. Certains sont plus marquants que d’autres, particulièrement ceux qui sont en avance sur l’histoire.

Imaginons Dibona, les Mayer et Rizzi tracer la première voie dans la face sud de la Meije en 1912, sous la Troisième Dent, sans aucun piton, après avoir remonté les bandes de neige déclives qui mènent à mi-face. Du bon V raide, athlétique, exposé, passant par moments dans du rocher décomposé. Hallucinant quand on pense au matériel de l’époque, corde en chanvre à la taille, chute proscrite. Quinze ans plus tard, Eddy Srofer viendra ajouter une touche d’audace à l’itinéraire en sortant tout droit par une fissure en dévers fort élégante.

La suite de l’histoire s’écrit avec Chapoutot et Wyns qui en 1969 créent une voie directe sur la première moitié de la face, permettant de rejoindre directement la voie Dibona et d’en faire un ensemble particulièrement esthétique. L’escalade n’est pas très difficile au regard de ce qui se fait déjà en ces temps (V+) mais elle remonte des dalles compactes où il a fallu aux ouvreurs beaucoup d’engagement et d’ingéniosité pour se protéger. Aujourd’hui, un ou deux goujons ont été mis à chaque relais, ce qui y rend la vie plus douce quand on imagine les ouvreurs se lancer dans ces dalles exposées, la cordée seulement reliée à un relais précaire sur mauvais pitons.

 
Entre-temps, le grand Cassin, Esposito et Tizzoni avaient réglé son compte, du premier coup et sans vraiment savoir où se trouvait cette montagne, à l’éperon le plus haut et le plus élégant de la face nord des Grandes Jorasses, celui qui soutient la Pointe Walker. Le cheminement qu’ils ont suivi est vraiment extraordinaire. Dans cette voie, lorsqu’on lève la tête, on est la plupart de temps surplombés de tours et boucliers compacts intimidants qui semblent barrer le chemin. Pourtant, à chaque fois il y a une faille, une faiblesse… mais il n’y en a qu’une ! La magie de la géologie.


On imagine les questions qu’a du se poser la cordée héroïque pendant ces trois jours d’ascension lorsqu’elle levait la tête… Rien n’est jamais évident ni acquis d’avance. L’engagement absolu en 1938, même s’il en fallait sûrement plus pour impressionner ces grimpeurs des Dolomites déjà habitués aux parois verticales et déversantes comme celles de la Cima Ovest di Lavaredo. Pas de doute que ces gars-là avaient 20 ans d’avance sur leurs pairs d’Europe occidentale.

Un passage est particulièrement marquant quand on se met à leur place… C’est la première longueur des Dalles Noires, au-dessus de leur second bivouac, lorsqu’il faut s’élancer en oblique dans un mur compact où il a du vite paraître évident à Cassin qu’il ne pourrait pas pitonner, en direction d’un dièdre dont il faut espérer qu’il ne soit pas aveugle. Ce n’est « que » du V+/6a, une plaisanterie aujourd’hui, mais quand on se met à la place de l’ouvreur en grosses chaussures sur ces prises rondes… c’est mutant, comme on dit de nos jours. Sacré Riccardo, quel grimpeur. Devenu centenaire en plus !


Je parle de ces voies car elles étaient pour moi des balises que je voulais poinçonner un jour au fil de ma vie d’alpiniste. Collectionneur invétéré, on ne se refait pas… et le temps passe. J’ai ainsi profité d’une période libre en plein été pour partir en vacances… à la montagne et rejoindre Kaoli à Grenoble afin de s’échauffer dans la face sud de Troisième Dent à la Meije, après un passage à La Bérarde, non sans un brin de nostalgie car j’y avais passé de si beaux étés quand j’ai commencé à travailler comme aspirant-guide puis guide.

Ça a failli mal commencer car partis trop tôt et un peu léger sur ma préparation de course, j’ai erré deux heures dans la nuit noire pour trouver le bon passage permettant de franchir la première barrière de toits puis ça a bien roulé et nous avons beaucoup aimé cette voie. Sortis pas trop tard, nous avions le temps de descendre à La Grave mais en passant devant le refuge de l’Aigle, magnifiquement refait et peu fréquenté ce soir là, on a eu un petit coup de flemme et envie de prolonger le plaisir d’être dans le calme de l’Oisans. Bien nous en a pris, quel bel endroit et bon accueil, avec en prime la rencontre de Maxime pour se raconter des histoires de guides.



Kaoli est, parmi d’autres activités pratiquées avec boulimie, une traileuse infatigable qui se connaît très bien dans l’effort. Une fois, je lui ai dit sous forme de boutade ou je sais plus comment qu’il fallait qu’elle grimpe parce qu’un jour, je l’emmènerai à la Walker. Ce n’est pas tombé dans l’oreille d’une sourde et de mon côté ce n’était pas une proposition désintéressée puisque c’est celle qu’il me restait à gravir parmi la trilogie des voies historiques des années 30 sur les grandes face nord des Alpes (voies Schmid au Cervin, Heckmair à l’Eiger et Cassin aux Jorasses).

Nous avons eu de la chance car au refuge de Leschaux, une seule cordée, des italiens, avait le même objectif et ils nous ont laissé partir devant. De plus, une autre cordée (pyrénéo-iséroise) seulement se trouvait engagée dans la paroi depuis la veille. C’est un facteur important car au vu des zones détritiques que l’on traverse par moments et des impacts de pierres partout visibles, ça doit être une voie très dangereuse quand il y a du monde. Pour notre part, nous n’avons vu passer ni missile ni même gravier et tout s’est déroulé à merveille. La voie était tellement sèche que Kaoli a mis les chaussons à R0 et les a enlevé au sommet de la pointe Walker sans jamais toucher ni neige ni glace. De mon côté, réchauffement climatique oblige, j’avais troqué les chaussures d’alpinisme pour des tennis d’approche, avec lesquels j’ai fait 95% de la voie. Nous étions à 17h30 au sommet et avons pu, plus lentement et laborieusement cette fois, descendre dormir au refuge de Boccalate par cette voie normale des Jorasses qui n’est jamais une partie de plaisir.

 
 

 
Sacrée Kaoli, indestructible sur le rocher comme en courant dans ses montagnes de Sallanches ou encore les pieds calés dans des pédales de vélo. Pour quelqu’un qui, la première fois que je l’ai vue dans un stage à l’ENSA, nous avait dit qu’elle voulait faire des courses de neige parce qu’elle n’aimait pas le rocher, c’est pas mal !

On trouvera plus de photo de ces deux voies sur mon site :
 
 


jeudi 4 août 2022

Messageries piratées

Mes comptes de messagerie dont gmail.com sont piratés par quelqu'un qui me fait des demandes de rançon, du chantage et du harcèlement. Ainsi, si vous recevez un mail de ma part demandant un virement en guise d'acompte pour un stage ou autre, l'ignorer car ce n'est pas moi qui écrit. À savoir : je ne me fais jamais payer par virement, ni pour les acomptes, ni pour le règlement final donc attention de ne pas tomber dans le piège. Aussi, pour me contacter, privilégier en ce moment les sms ou le téléphone. Désolé pour ces désagréments.